MÉNINGIOMES : L’ANGOISSE D’UNE INTERVENTION À TRÈS HAUT RISQUE.

Emmanuelle Choussy
19 min readNov 30, 2021

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1- LE DIAGNOSTIC.

Les années 2020 et 2021 ont été particulièrement difficiles pour moi. Covid et missions-photo annulées, manque de sens dans mon métier, post-chirurgies handicapantes et plusieurs deuils dont celui de ma mère… Mais c’était sans compter sur 2022 qui s’annonçait tout aussi délicate, dans un autre genre.

“Savez-vous ce qui différencie une tumeur maligne (cancéreuse), d’une tumeur bénigne ?”

C’est la question qu’aurait du me poser le neuro-radiologue qui a effectué mon I.R.M. encéphalique le 08 septembre 2021. Car quand il m’a dit : “Il n’y a pas d’urgence vitale, c’est bénin, pas cancéreux !”, j’ai entendu, tout comme les premières personnes à qui j’en ai parlé : “C‘est bénin donc ce n’est pas grave.”

Mais SI, Si et SI, une tumeur au cerveau, C’EST grave ! Se faire ouvrir le cerveau et assumer les conséquences relatives à une intervention à très haute risque, alors qu’on aurait pu éviter la tumeur au départ, C’EST grave !

Donc la différence c’est que dans le cas d’une tumeur maligne, les cellules sont anormales et prolifèrent de manière anarchique dans un tissu ou un organe. Une tumeur maligne peut s’étendre à d’autres parties du corps en fabriquant des métastases. Ce n’est pas le cas des méningiomes dit “bénins”. Je préfère le terme “non cancéreux” que “bénin”, comme beaucoup de victimes.

Commençons par des définitions simples avant d’aborder plus loin mon cas personnel.

Pour lire directement mon témoignage, merci de descendre un peu plus loin après la partie “scientifique” qui commence ici :

2- QU’EST-CE QU’UN MÉNINGIOME ?

Le méningiome est une tumeur qui se développe à partir des méninges (enveloppes autour du cerveau). Ces tumeurs sont le plus souvent non cancéreuses mais peuvent être à l’origine de troubles graves pouvant nécessiter une intervention chirurgicale lourde et à risque.
C’est une tumeur bénigne (par opposition à maligne), d’évolution lente, mais d’évolution variable. Le méningiome peut cependant être agressif vis-à-vis du cerveau ou du cervelet, non seulement parce qu’il le déplace, mais aussi parce qu’il peut l’irriter.

Les méningiomes trouvent leur origine dans les méninges, trois membranes entre le cerveau et le crâne. Le méningiome croît en dehors de l’arachnoïde qui est la membrane intermédiaire des méninges, la dure mère étant la plus externe et la pie mère à l’intérieur (Voir schéma ci-dessous). Les méningiomes pressent le cerveau lorsqu’ils croissent. Environ 85% des méningiomes sont bénins, de grade I.

La dangerosité d’un méningiome est donc liée à son emplacement, sa forme et la pression qu’il exerce sur une zone définie du cerveau.

A) SYMPTÔMES DES MÉNINGIOMES :

Un méningiome peut entraîner des symptômes par compression du cerveau, mais certains méningiomes sont trouvés incidemment par IRM. Les signes peuvent être très différents selon la taille et la localisation de la tumeur.

Les symptômes les plus souvent rencontrés chez les patientes sont : troubles cognitifs (parole, mémoire…), de la vision, vertiges, faiblesse dans les bras ou les jambes, paralysie, hémiplégie, troubles de l’audition, troubles de l’odorat, convulsions, épilepsie, troubles du comportement, dépression liée à l’acceptation de la situation, de la dégradation du sommeil ou de la gestion difficile des symptômes et des difficultés au quotidien.

B) TRAITEMENT DES MÉNINGIOMES :

Certains méningiomes n’ont pas besoin d’être traités immédiatement et peuvent rester asymptomatiques et non détectés pendant de nombreuses années. Dans certains cas une surveillance par imagerie reste la recommandation du neuro-chirurgien.

Il n’y a aucun médicament permettant de réduire ou supprimer ces tumeurs. N’étant pas cancéreuses, la chimiothérapie n’est pas utile. L’arrêt des traitements incriminés ne suffit parfois pas à faire régresser les méningiomes, ni à stopper leur croissance, malgré ce que certains gynécologues disent encore à leurs patientes. De telles informations sont graves et fausses : nous avons des témoignages de femmes qui ont cessé le Lutényl depuis 10 ans dont les méningiomes (on peut en avoir plusieurs) ont continué de grossir depuis. Il est possible en effet que les tumeurs diminuent après l’arrêt des traitements mais ce n’est pas systématique.

Si la chirurgie est proposée, c’est parce que le méningiome est volumineux, mal placé, qu’il a augmenté de volume ou qu’il entraine déjà des signes neurologiques. La chirurgie en effet reste le moyen le plus radical puisqu’elle enlève la lésion. Cette chirurgie peut parfois être difficile voire impossible lorsque le méningiome est situé dans des régions qui exercent une fonction importante (région motrice ou région du langage, par exemple) ou lorsque le méningiome est en contact avec des veines, notamment la grosse veine médiane qui draine le cerveau (le sinus longitudinal supérieur) ou les veines bordantes qui sont les veines de drainage du cerveau.

Ces conditions particulières peuvent gêner l’ablation de la tumeur. Elles peuvent expliquer les manifestations cliniques du méningiome mais aussi les risques opératoires dont parlent les neurochirurgiens en consultation. Il arrive pour ces raisons, que le neurochirurgien ne puisse pas enlever la lésion en totalité. Dans ces cas-là, il est possible soit de surveiller le fragment de tumeur qui est laissé en place, soit de proposer une radiothérapie spécifique du méningiome.

Dans certains cas, la radiothérapie peut être le seul traitement possible. C’est peu fréquent sur les tumeurs de plus de 3cm, mais chaque cas est considéré par les neuro-chirurgiens qui gèrent les traitements au cas par cas.

3- LE DÉPISTAGE DES MÉNINGIOMES.

A) Pour les habitantes de HAUTE-GARONNE DEPUIS 2020 :

Un centre de dépistage rapide a été mise en place dans le très réputé service de NEUROLOGIE de la CLINIQUE DE L’UNION. Avec une simple lettre d’adressage de votre généraliste ou gynécologue, vous pouvez accéder à ce dépistage. Lire ici l’article de la Dépêche du Midi de Juin 2021. N’hésitez pas à le diffuser auprès de votre entourage.

B) POUR TOUTES LES FEMMES :

Pour les femmes qui ont pris de la progestérone (ou l’un de ses dérivés ou génériques, y compris localement par les stérilets type Mirena) pendant plus de 6 mois, à fortiori plusieurs annéeS ou décennies, consultez votre médecin traitant ou gynécologue afin de vous faire remettre un courrier d’adressage et de pouvoir planifier une IRM de contrôle.

4- MON HISTOIRE, MON MÉNINGIOME.

Venons-en au pourquoi de cet article. “Le mien” est dû à la prise de progestérone (Lutényl) et de génériques pendant 25 ans (5 ans de Surgestone après 20 de Lutényl). Au départ on m’a donné cette molécule car j’avais fait déjà une grossesse sous pilule “mini-dosée” . J’avais aussi des règles anormalement hémorragiques et douloureuses qui m’empêchaient de bouger deux jours tous les mois, et d’énormes douleurs aux seins — à l’époque on connaissait mal l’endométriose (c’est un autre sujet), et ces “pilules-miracle” ont été prescrites, et continuent de l’être, à tort à et à travers. Il ne fait aucun doute pour les trois spécialistes vus ces derniers mois que ma tumeur vienne de la prise de ces traitements.

A) SENSIBILISATION ET PRÉVENTION.

Je voudrais sensibiliser les femmes qui ont pris de la progestérone pendant plus de 6 mois ou qui continuent d’en prendre : les génériques du Lutényl, Lutéran et Androcur AUGMENTENT AUSSI LES CHANCES DE DEVELOPPER DES MENINGIOMES.

Si vous avez porté un stérilet hormonal vous êtes également concernée.

Dans le groupe Facebook de l’association AMAVEA, nous voyons aussi chaque semaine arriver des femmes qui découvrent leur méiningiome et qui n’ont pris “que des pilules normales” comme elles disent, comme Optimizette…

Lire ici l’article le plus récent de l’Assurance Maladie à ce propos.

Oui je suis en colère depuis cette I.R.M. du 08 Septembre 2021, car en bientôt 30 ans de migraines, alors que j’arrive parfois à me persuader que mon cerveau va imploser ou que je vais mourir d’un A.V.C tellement je souffre, AUCUN MEDECIN n’a jamais jugé bon de me faire passer une I.R.M. de contrôle pour évacuer le risque de méningiome (ou autre). Evidemment à l’époque on ne connaissait pas encore les gros effets secondaires de ces traitements. Mais au lieu de me prescrire des médicaments, de l’ibuprofène au Zomig, des molécules expérimentales, des sprays nasaux, des bêtabloquants qui provoquaient des périodes d’apathie impressionnantes, PERSONNE n’a trouvé utile de contrôler mon cerveau en 25 ans, juste de contrôler… Ni les 7 ou 8 médecins généralistes consultés sur Toulouse entre 1995 et 2011, ni notre médecin de famille durant mes 6 ans de vie à Los Angeles.

“Ca n’a effleuré l’idée de PERSONNE en 30 ans et c’est une honte.”

B) COMMENT A-T-ON PU MANQUER ÇA ??

Entendre le radio-neurologue me dire : “Je n’avais jamais vu un méningiome de cette forme et il doit être très ancien parce qu’il a déplacé des os dans votre cerveau”, a immédiatement fait défiler sous mes yeux le visage de TOUS ces médecins qui ont laissé passer l’occasion de le découvrir plus tôt, donc moins gros, moins étendu, moins dense. Ce professionnel “oubli” de prononcer (et de glisser dans son compte-rendu écrit) le therme adéquat. J’ai ce qu’on appelle un ostéoméningiome. Je le déduis toute seule en lisant les témoignages des victimes de l’association AMAVEA dont je parlerai plus loin.

Et ce même monsieur ne prend même pas la peine de me diriger vers un spécialiste dans sa clinique, non, il me dit simplement : “Je ne suis que radio-neurologue mais il faudrait surveiller le méningiome et revenir dans 6 mois, ça serait bien”. Je sors de la clinique en larmes, les bras me tombent, j’en parle à mon gynécologue “qui ne peut pas m’aider car il ne connaît pas de patiente concernée” mais qui me témoigne de son sincère soutien. Ma généraliste quant à elle, sans avoir vu l’I.R.M. me glisse en visio au détour d’une phrase sur autre chose, un petit : “Oui on connait ça, à surveiller, c’est bénin.” OK et sinon, est-ce que mon cas personnel intéresse quelqu’un ???

Très bien, je vais me débrouiller seule alors. Comme d’habitude en ce qui concerne la santé. Seule avec mon internet !

Meet my tumor!

5- L’ASSOCIATION AMAVÉA : support aux victimes, et TANT d’autres choses !

Bien entendu il existe de nombreuses ressources concernant ce problème identifié récemment (les premiers résultats des études sur les médicaments concernés datent de 2018/2019). Je me documente largement en lisant des dizaines et dizaines d’articles sur les méningiomes mais je suis frustrée à l’annonce de mon diagnostic car je n’ai personne à qui expliquer le choc qu’une telle nouvelle vient de provoquer dans mon existence. Ou plutôt je n’ai personne qui semble vraiment comprendre les enjeux émotionnels, pratico-pratiques ni médicaux de ma nouvelle situation.

Je me sens horriblement seule. En quelques semaines je perds peu à peu l’envie de sortir, de communiquer, de voir mes amis, de travailler (mais j’y vais quand même). Je redoute d’être confrontée à ces fameux : “C’est pas grave on t‘a dit que c’était bénin !” ou pire les insensibles : “C’est l’univers qui t’envoie cette épreuve pour te faire bosser ton lâcher-prise !” C’est en effet exactement ce qu’on a envie d’entendre en apprenant qu’une tumeur de 8cm de long se développe depuis au moins 20 ans le long de son sinus droit.

Puis je découvre assez rapidement les coordonnées de l’association AMAVEA, ainsi que leur groupe de soutien aux victimes de méningiomes hormonaux sur Facebook. Les réseaux sociaux ont parfois cette capacité à rassembler les malades et assurer un “accompagnement”, même virtuel, que nous n’avons pas par ailleurs et je trouve ça absolument formidable.

Pour les gens intéressés, je glisse le lien de leur formidable livret explicatif, que la SECU devrait vraiment remettre à chaque personne qui vient d’être confrontée à ce diagnostic.

Deux mois d’attente pour rencontrer un premier neuro-chirurgien.

Et c’est peu finalement. Je choisis au hasard un premier docteur sur Toulouse. J’étais fragile et il n’a pas compris ce qui se jouait pour moi. En étant froid, limite moqueur, il a accentué mon malaise. J’étais accompagnée de mon ex-spécialiste gynécologue maintenant retraitée, devenue une conseillère bienveillante.

Je comprends qu’il n’y a pas d’urgence vitale (je le sais depuis l’IRM), mais il propose d’intervenir dans les semaines qui arrivent pour supprimer la tumeur “car elle est très symptomatique”. Wow, je prends littéralement un train dans la gueule (et de deux !). J’ai alors confirmation qu‘il s’agit bien d’un osteoméningiome, c’est à dire que la tumeur a envahit la partie osseuse de mon crâne, qu’elle s’est calcifiée, et qu’une fois la craniotomie effectuée (on incise le crâne d’une oreille à l’autre), il faudra briser et supprimer cette partie osseuse pour le reconstituer avec… du ciment.

Bon ça suffit, c’est à peu près tout ce que je redoutais d’entendre, et puis tant de froideur me glace le sang, je ne m’attendais pas à être reçue comme ça… Je me sens mal, j’ai des nausées et envie de pleurer et surtout de sortir de là en courant. Une fois assise dans ma voiture je m’effondre.

“C’est un cauchemar, on doit parler de quelqu’un d’autre…”

Le professeur Franck-Emmanuel ROUX, photo par Amavea.

6- TROUVER LE BON SPÉCIALISTE.

L’association AMAVEA, qui déplore souvent ce genre de comportement, me dirige alors vers l’hôpital Purpan où je rencontre le Professeur Franck-Emmanuel ROUX, qui travaille avec elle à l’élaboration des livrets d’information. J’obtiens un rendez-vous en 10 jours, incroyable, encore quelques nuits blanches à passer mais pas des mois d’attente !

A) UN MÉDECIN EMPATHIQUE.

Cet homme est tout ce qu’on attend d’un bon professionnel de santé : doux et empathique, souriant, bienveillant, à l’écoute, il prend son temps, s’intéresse à moi, à mon quotidien, comprend que je suis maman solo et non-salariée, et donc que si un jour l’opération s’impose, il faudra anticiper un certains nombre de choses. Il me demande de ne plus venir seule à nos rendez-vous. Le médecin comprend mon état de stress, mes nuits blanches, mes larmes. Je lui explique mes angoisses : l’intervention, le post-opératoire, pas d’indemnités journalières, pas d’aide à domicile, un collégien à gérer seule, le travail, les séquelles, tellement différentes d’une femme à l’autre… La cicatrice, je suis une femme coquette, je me déplace en clientèle, je n’assumerai pas une méga balafre sur le front (ma tumeur longe le sinus), ni une perruque…

Et bien au-delà de l’aspect esthétique, pourrais-je au moins re-travailler un jour, porter du matériel photo, gérer le stress, partir en reportage ? Mon Dieu j’ai tellement peur… Je suis effondrée devant son empathie, qui au final me fait un bien fou.

Il m’apporte aussi des précisions sur mon IRM, dessine la schéma d’un crâne et me montre comment mon osteoméningiome a bien déformé ma boîte crânienne et créé comme un “trou”, une zone “vide”, à côté de mon sinus droit, juste au-dessus de mon oeil droit. Je suis bouche bée car cela se voit très bien à l’IRM mais ni le neuro-radiologue ni le premier neurochirurgien déjà consultés n’avaient pris le temps de me montrer ces “détails”. Heureuse aussi que rien ne se voit de l’extérieur, car il arrive que les ostéoméningiomes déforment très visiblement la boîte crânienne, comme c’est le cas pour de nombreuses victimes de l’association qui n’osent plus sortir à cause de cette difformité…

Décidément dans mon malheur j’ai vraiment de la chance…

Le professeur Roux dit une chose très importante qui m’apaise immédiatement :

“Le fait qu’il soit probablement très ancien est un élément qui joue en notre faveur” (“Notre”, youpiiii je ne suis plus seule !).

Cela veut dire qu’il n’y a pas d’urgence (j’avais compris) à intervenir, et que le méningiome grossit très lentement.

“Nous n’allons pas parler d’intervention aujourd’hui, c’est trop tôt. Nous allons programmer une IRM et un scanner de contrôle dans quelques mois. D’ici là, vous essayez de respirer, de dormir, de digérer la nouvelle, de reprendre le contrôle sur votre quotidien. Je reste à votre disposition pour la moindre raison, question, angoisse… Je suis là pour vous aider. Ca vous donne quelques mois pour “souffler” un peu…”

B) UN RÉPIT DE 5 MOIS.

5 mois pour me faire à l’idée, pour trouver les mots pour en parler à mon fils, à mes amis proches. J’évolue dans une espèce de semi-coma pendant presque 3 mois. Comme droguée, dans la ouate, je suis distraite, pas le courage de travailler, pas envie de sortir, pas envie de faire semblant que tout va bien. J’essaye de me raisonner, de rester tranquille, de retrouver le sommeil sans reprendre d’anxiolytiques (je venais juste de m’en débarrasser suite au décès de ma mère en avril dernier, pas envie de retomber dans ce schéma…) Et je réussis, tant bien que mal, à appliquer les conseils du docteur. Les nuits sont courtes, les crises d’angoisse omniprésentes, jour et nuit. Je regarde mon fils qui grandit et me raccroche à son sourire.

Mais la dépression (qui me guette depuis mon retour des USA 4 ans auparavant) a fait son nid et prend ses aises…

Copyright Ona Praderas — merci pour l’empathie :)

C) MALADRESSE DE L’ENTOURAGE.

Le peu d’amis au courant sont parfois maladroits : “On s’en fout que tu sois arrêtée 6 mois ! ” “ Heu ok, mais c’est toi qui va payer mon loyer ?”. “On s’en fout que tu portes une perruque !” “Oui ben pas moi, pas envie de me justifier auprès des mes clients ni des inconnus…”
La plupart du temps il ont la réaction parfaite, ils m’écoutent et comprennent ma peine, ma colère, appréhendent le futur avec moi, cherchent des solutions. Ma cousine d’amour me dit : “Le jour où il faut y aller, tu montes ton bataillon et hop, à l’attaque, tous ensemble !” J’ai trouvé ça génial. Elle a raison, et ça c’est moi, il faut que je me re-programme ! Je ne suis pas seule, tous mes “vieux” amis sont là, aucune intention de déserter.

Mais dans mes connaissances, 4 personnes quittent ma vie peu après l’annonce du diagnostic. 3 d’elles-mêmes et une que j’aide.

Il faut en parler; tous les humains ne sont pas capables d’empathie. Une “amie” qui après trois ans de contacts quotidiens et quelques épreuves surmontées main dans la main, m’appelle un beau soir d’Octobre pour m’annoncer que “toute cette noirceur c’était trop négatif pour elle, tellement à l’opposé de ses énergies du moment…” En raccrochant après son hypocrite “gros bisous, bonne soirée !”, je savais que je ne la reverrais plus. Quel être humain peut faire preuve d’une aussi grande cruauté vis-à-vis d’une “amie” ? Un comportement en dessous de tout. Ca m’a rappelé ces gens qui sont toujours là pour aller au resto ou faire la fête puis qui disparaissent quand tu perds tes parents.

Je n’ai même pas prévenu ma famille, à part ma cousine dont je suis proche, je n’en vois pas l’utilité, je redoute trop les réactions maladroites ou l’absence de réaction. J’ai spontanément prévenu les gens qui me connaissent bien et avec qui j’ai des relations régulières et saines. Difficile de sortir de mon “semi-coma” mais je savais bien qu’après une longue période de “digestion”, viendrait celle de l’action. L’action de prévenir mes amies d’abord, mes proches et mes connaissances, par le biais de cet article que je diffuserai à qui veut bien le lire et surtout le considérer.

7- IMPOSSIBLE DE NE PAS AVOIR L’INFO.

A) L’INFO EST DISPONIBLE PAR VOIE OFFICIELLE.

À compter du mois de Janvier 2022, AUCUNE FEMME étant ou ayant été en contact prolongé avec ces traitements ne pourra dire qu’elle “n’était pas au courant”.

Un courrier de la CNAM, rédigé en collaboration avec AMAVEA, sera adressé individuellement à toutes les patientes qui ont pris ces traitements. Les courriers remonteront deux ans en arrière. Pour celles qui les ont pris plus récemment, c’est le corps médical qui fera signer un document aux patientes : généralistes, gynécologues, pharmaciens… S’ils ne le font pas, ces gens seront hors la loi.

Le 29.11. 21 j’ai donné une interview à mon ami journaliste Brice VIDAL qui, après avoir pris mon “alerte” au sérieux, a été le premier sur Toulouse à faire une enquête de fond, en contactant AMAVEA, le professeur ROUX, le cabinet d’avocat DANTE en charge du volet pénal, et une victime. J’ai décidé de ne pas me cacher, ce n’est pas simple. Espérons que cela m’aide à accélérer mon gros boulot d’acceptation…

France 3 est venu me rencontrer en novembre 2021. Ces articles sont consultables au bas de cette page.

B) JE ME DOIS D’AGIR.

Ne rien faire reviendrait pour moi à de la non-assistance en personnes en danger.
D’abord égoïstement je dois transformer mon chagrin, ma peur et ma colère en une énergie bienfaitrice et UTILE, au service de l’information et de la prévention pour d’autres femmes. Également pour toutes les victimes potentielles qui ignorent de quoi elles souffrent, que leur(s) tumeur(s) soi(en)t asymptomatique(s) ou non. Désormais on détecte ces méningiomes facilement et on explique ces symptômes passés sous silence parfois durant des décennies : épilepsie, perte partielle de la vue, de l’odorat, vertiges, chutes, troubles de la mémoire, fatigue généralisée, migraines intenables…

Alors oui ça fait flipper, il y aura toujours des femmes dans le déni, trop occupées ou pas concernées, qui ne feront pas leur examen de contrôle. C’est leur choix et il est respectable aussi. Moi au moins, j’aurais fait mon job : parler de mon expérience, leur dire que ça n’arrive pas qu’aux autres et que parfois ces tumeurs “bénignes” peuvent avoir de lourdes répercussions sur le quotidien.

C) Pour finir, je dirais que J’AI DE LA CHANCE !

Au sein de celle qui est maintenant devenue “mon asso”, je “e-rencontre” des femmes de profils tellement différents…

Notre point commun : notre méningiome. Certaines en découvrent plusieurs. Certaines ont des symptômes très invalidants malgré la petite taille de leur(s) tumeur(s), ou bien elles sont mal situées et les interventions provoquent des séquelles importantes… D’autres ont moins de symptômes ou arrivent à vivre avec.
Quels sont précisément les miens ? Certaines migraines de longue durée qui s’intensifient (elles ne sont pas toutes imputables à la tumeur, qui je le rappelle longe mon sinus droit et “appuie” sur un nerf optique sans provoquer d’oedème), et des troubles cognitifs : perte de la mémoire ou troubles du langage, j’oublie des mots, des noms, certains s’inscrivent dans ma tête mais je ne peux les lire, ou bien j’ai des mots qui viennent spontanément qui ne sont pas du tout ceux que je cherche…. Ca c’est assez nouveau, j’ai remarqué ces soucis début 2022, à une période où je n’étais ni surmenée ni assommée par ma charge mentale de maman solo.

Je pense qu’il va falloir que je le précise à certaines personnes, notamment à des clients avec qui je suis en rendez-vous et qui ne doivent pas comprendre pourquoi je “bloque” parfois sur un mot en m’arrêtant au milieu d’une phrase…

MAIS, oui j’ai de la chance ! Je ne convulse pas, mes nerfs optiques et olfactifs fonctionnent, je peux encore m’occuper seule de mon fils, je peux avoir une vie quasi-normale. Malheureusement je dois composer au quotidien avec d’autres douleurs chroniques invalidantes apparues fin 2020 lors d’une intervention gynécologique.

Ce que ça change concrètement ? Je suis ralentie dans mes tâches personelles et professionnelles, et il m’est devenue impossibler de gérer plusieurs “grosses missions” sur une même journée, ni d’enchaîner les rendez-vous comme je le faisais encore récemment. Mon cerveau est très vite fatigué, les migraines arrivent vite, accompagnées d’acouphènes parfois hyper stridents qui me forcent à m’isoler.
J’essaye d’être indulgente envers moi-même. Quand ma tête menace d’exploser, quand je ne peux plus sortir alors que je m’y étais engagée, quand ma vie sociale pâtit de ma fatigue, c’est OK… C’est comme ça. Je ne me demande plus ce que les gens vont penser. Ceux qui ont envie de comprendre et de rester restent, les autres…

Difficle de retrouver une relative sérénité, un sommeil moins chimique, le sourire en journée, l’énergie pour mon fils. Le reste m’importe peu. Car aujourd’hui ça peut aller.

Mais demain ?…

8- LES UPDATES.

Update du 02 juin 2024 :

Après deux années de dépression liée à ma santé défaillante (tumeur, ennuis post-opératoires gastriques et gynécologiques, insomnie chronique, activité professionnelle en dents de scie…), mon quotidien est devenu très difficile, m’empêchant de travailler, de prospecter, d’aller en rendez-vous et de faire “comme si tout allait bien”. Je souffre et j’ai décidé de l’admettre enfin. Je trouve soutien auprès de ma médecin généraliste et d’un psychologue formidable qui m’accompagnent pour monter mon dossier à la MDPH. Avec l’espoir de faire reconnaître toutes mes maladies invalidantes, renaît aussi l’espoir de retrouver un peu d’énergie et de me remettre rapidement au travail, ce qui est devenu impossible depuis quelques mois.

Update du 15 Mars 2022.

Mon scanner d’hier confirme “un méningiome en plaque frontal droit” et montre une nouveauté : “plusieurs portions de tissulaires non calcifiées”, et ce qui me paraît être une mauvaise nouvelle : “une hypodensité parenchymenteuse associée plus marquée que précédemment”.

A confirmer par une I.R.M. le 12 Avril prochain, puis nouveau rendez-vous avec le professeur Roux le 25 Avril. Encore un long mois et demi à me projeter dans l’incertitude…

Update du 19 Juillet 2022.

Acouphènes quotidiens depuis Mars 2022, crises d’angoisse la nuit, impossibilité de dormir et crises de larmes impromptues... Le professeur Roux et mon généraliste m’ont conseillée de me faire aider pour “souffler un peu”. Anxiolytiques pour retrouver un semblant de sommeil, puis antidépresseurs, et consultations chez un psychologue.
La dépression qui me menaçait depuis ma double intervention de Décembre 2020 a pris toute sa place dans ma vie.

Je ne peux plus faire comme si tout va bien, je n’arrive pas à vivre dans la menace permanente de l’ouverture de mon crâne et d’une plaque de ciment à la place du trou que la tumeur laissera. Je n’arrive pas à m’imaginer ne plus travailler comme avant après la craniotomie. Je n’y arrive pas…

J’essaye de composer avec cette nouvelle incapacité d’être sereine, pour ne pas passer à côté de l’essentiel et des petits moments de bonheur de la vie…

Emmanuelle Choussy —

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